L’enjeu

Tant en peinture qu’en photographie je tente d’atteindre l’émoi dans l’œuvre. S’il est de même nature, cet enjeu empreinte cependant des chemins différents pour chacun de ces domaines artistiques.
En photographie, il se joue dans la capture pour restituer le moment vécu, et est arrêté techniquement dans la prise de vue. En peinture il se vit dans le déroulement de l’acte pictural, geste après geste dans l’œuvre, mais aussi face à ce qu’elle me renvoie. Il s‘établit dans cet incessant va et vient entre elle et moi.

Photo ou peinture, tout ce qui compose et caractérise l’œuvre repose sur cet enjeu.
Les défis qu’il soulève sont à relever, et s’établissent dans les choix à faire, les moyens à tenir, les difficultés à surmonter, pour qu’enfin l’œuvre puisse vivre par l’émotion ou les sentiments qu’elle génère.

Les champs du possible

La nécessaire et intuitive écoute du cœur et des sens laisse se manifester les doutes, les troubles et les incertitudes.
Ils sont les leviers qui incitent à prendre le temps pour laisser aux questions le temps de se poser, aux obstacles de se lever.
En cela j’agrandis mon espace, car l’imprévisible, le nouveau, la surprise et l’heureux hasard peuvent y prendre place.

Du sens

Sous un angle d’approche souvent intuitif, il ressort des choix spontanés, des impressions soudaines, mais aussi des réflexions nouvelles.
Attentive à cela, j’y découvre des sens implicites qui me ramènent et me questionnent sur ce qui est fondement de l’œuvre : mon intention.

Elle est le QUOI, pressenti depuis le début, mais que j’affine peu à peu en réfléchissant à son contenu, mais aussi à ses contours : Le comment dire ? Sous quelle forme en parler ?

Ainsi, du quoi j’en arrive au COMMENT, quelle direction prendre pour que la forme d’expression plastique soit la forme juste de mon propos.

Alors je creuse mon intention pour dégager et comprendre tout son sens, le glissant dans mes actes pour aller vers cette forme juste. L’oeuvre oscille alors entre deux pôles, la réflexion et le sensible, se nourrissant de chacun d’eux.

Le sens s’inscrit ainsi dans le faire par la voie du sensible, permettant par cela de recevoir l’œuvre dans un affectif imprégné de sens.

Force

Dans l’œuvre elle est à gagner, à inscrire en son sein par des connexions, des ressorts, des suspends ou des impacts, pour dégager une sensation particulière :
Faire que l’œuvre s’imprègne d’une dimension, celle d’un souffle en elle qui appelle le sensible, un souffle où l’intime est requis par la force du saisissement.

Un

C’est une «  épaisseur », une profondeur unifiante qui ne souffre d’aucun désaccord dans l’œuvre pour que celle ci soit saisit comme un tout.
Je la cherche dans la cohérence, les intimes correspondances entre ma sensibilité et l’expression plastique, et quand s’annule enfin toute distance entre l’œuvre et moi, je la sais être là.

Une nécessité

Il me faut écouter ce qui est rythme en moi : une pulsation à saisir, celle de la forme de mon ressenti.
Transposer cela dans l’œuvre, c’est chercher le juste tempo dans tout ce qui compose sa plastique :
La variété et les degrés de contrastes, les jeux de formes, la présence des choses et leurs espaces, la circulation qui s’établit entre les points d’appels et les silences, ce que porte le vide. Tout cela caractérise la singularité d’une atmosphère et d’une forme de discours qui instaurent une vibration particulière, bien au delà du thème, et qui est l’écho de mon ressenti, sa forme miroir, installée dans l’œuvre par la similitude de rythme.